Seules parmi les adultes

Seules parmi les adultes

Quand la réalité dépasse la fiction !

Marseille l’excessive, un monde médical méconnu et impitoyable, la période post-coloniale en Afrique noire, cette association sécrète, un thriller impensable. Brazzaville en république populaire du Congo en assure la genèse.

Après le décès suspect d’un premier patient, une deuxième patiente tombe dans un coma inexpliqué, le jour suivant en réanimation… Le professeur Roumazière, un chirurgien reconnu, au sommet de son art, voit sa vie basculer.

L’enfer de la chute commence…Le passé resurgit…

EXTRAIT DU LIVRE

Il faut voir ce bloc opératoire, seul îlot de vie à six heures du matin, dans cette clinique encore endormie. Les non-initiés prendraient peur. Un autre monde ! Tout est froid, dix-sept degrés dans la pièce, la teinte bleu clair des murs, habituellement apaisante, reflète une pâleur glaciale, un mauvais signal ! L’ordre et la répartition des différents points techniques impressionnent, rappelant certains films de science-fiction. Les bruits métalliques des instruments, le claquement des ampoules que l’on casse et la chute des petits objets dans les plateaux métalliques créent la musique du film, une très légère rupture de ce silence d’outre-tombe. Chacun prend conscience de la gravité du moment, le sérieux se prépare.

 

Samedi 28 mai, 5h du matin, téléphone

 

— Allô, François ? C’est Michel, à la « Réa » NewSud. Il faut que tu viennes immédiatement, c’est très urgent, je t’attends.

— Que se passe-t-il ?

— Arrive, je t’expliquerai, je ne peux rien dire au téléphone.

Quelle inquiétude ! Pour la première fois depuis 25 ans, Michel perd son calme. Habituellement rassurant, assumant sa responsabilité avec cette stabilité des gens qui savent, il réconforte, minimise, dédramatise.

Aujourd’hui, il appelle au secours. Que se passe-t-il ?

 

Sans attendre, le chemin vers NewSud défile à une vitesse inimaginable sur ce boulevard Michelet irréel, de nuit avec tous ces feux en enfilade, clignotant en orange (c’est l’habitude à Marseille, les feux clignotent et ne sont ni verts ni rouges à partir de 1 heure du matin). Le chemin est balisé, boulevard Michelet, obélisque, boulevard Delattre de Tassigny. Heureusement, car Roumazière est dans ses réflexions angoissantes, pourquoi ? Comment ? Il se repasse les films de ses opérations à la recherche de… il ne sait pas quoi. Sa tête en vrac n’est pas à la conduite, mais déjà dans l’interrogation de ce qui l’attend.

Pour que Michel soit dans cet état au téléphone…

Il laisse sa voiture au milieu du parking, le plus près de l’ascenseur. Qu’il est lent pour monter ces deux étages, il aurait plus vite fait à pied. Les secondes lui paraissent interminables, ce ne sont que des secondes… Enfin la Réa.

 

— Tu es arrivé ? Viens dans mon bureau, je vais tout t’expliquer. Michel l’attend, fébrile comme Roumazière ne l’a encore jamais connu.

Une atmosphère particulière baigne l’endroit. Chacun a la tête des mauvais jours et s’affaire sur des tâches fictives, prétextes à une attitude d’évitement. L’enthousiasme constaté la veille dans ce même lieu s’est brutalement transformé en une paralysie générale, aucune parole, les regards se détournent, fuyants.

 

— Mais, bon sang, que se passe-t-il ?

— Je vais t’étonner, François, mais je n’y comprends rien. Brutalement, Monsieur Hartmann qui était très bien jusque-là, décompense un choc gravissime. Tous nos efforts sont vains et il décède en moins d’une heure.

— Tu penses à quoi ?

— À rien, justement.

 

2017, quatre semaines après le workshop

 

Que se passe-t-il ? Tous ces clignotants bleus, la police, une ambulance de pompiers, marins-pompiers de Marseille, et même le triste fourgon blanc. Une animation de série B américaine, pourtant bien réelle dans le cas présent. Sur le brancard, un sac noir allongé, très mauvais pronostic. Ce sac est poussé à l’intérieur du fourgon blanc, un fourgon frigorifique, les deux portes arrière ouvertes, un tiroir tiré, prêt à accueillir le corps emballé.

Le commissaire Martinez et Sophie Marchand s’activent. Un périmètre délimite la scène. Le sol maculé d’une énorme tache rougeâtre, plaque de sang encore frais, de toute évidence, ne laisse planer aucun doute sur l’état du corps retrouvé au bas de l’immeuble de la clinique.